Pony Island – Pony queue ni tête

Ah, les vieilles bornes d’arcade, ces gouffres à pognon avec ces continues insuffisant qui te poussent à remettre une pièce, puis une autre et encore une autre, selon un schéma bien orchestré pour te vider ta tirelire de gamin. Avec en bruit de fond les conversations de comptoir qui couvrent les bruitages du jeu et une chape de fumée de cigarette pour l’ambiance.

Pony Island démarre en branchant une de ces machines et présente un menu d’époque. Sauf que si le début est simple, ça va vite se bordéliser car le jeu est tout pété. Des glitches partout, des options qui se cassent littéralement la gueule, des bugs à exploiter et des cheats modes qui nous valent une engueulade lorsqu’on les active.

Qu’il est meugnon !

Lancé à la rescousse d’une âme perdue dans le jeu, il faut effacer des fichiers pour lui rendre sa liberté. On commence doucement avec un petit poney mignon qui doit sauter des barrières. Ces phases de plateforme se complexifient doucement mais il faut régulièrement se battre contre le jeu qui à coups de bugs et de messages codés nous oblige à trafiquer des fichiers et les menus pour accéder aux niveaux suivants.

La petite voix qui nous accompagne nous prévient que certains niveaux ne sont pas terminés, qu’il ne faut pas cliquer ici ou là mais en rentrant des codes trouvés au hasard des menus, on débloque l’accès à de nouvelles parties pour enfin effacer le premier fichier corrompu. La suite continue dans le grand n’importe quoi, entre le jeu volontairement mal foutu, des graphismes qui vont du noir et blanc genre prototype au mignonnet plein de fleurs et de papillons, pour mieux retomber dans un sombre et inquiétant monde bugué.

Mais faut pas l’énerver.

La narration est très réussie, beaucoup d’autodérision (avec notamment ce panneau planqué qui affiche des dizaines de clés Steam avec le message : soyez sympa, n’en prenez qu’une), un gameplay qui n’est qu’un prétexte à l’aventure dans le code du jeu, on fouille partout pour trouver les secrets et les bugs graphiques qui sont des portails vers la suite de l’histoire, on est tenu en haleine par cette succession de puzzles et de phases d’action pour le plaisir de découvrir le prochain délire du créateur.

La borne d’arcade elle-même est un élément de narration parfaitement intégrée, on relance le programme plusieurs fois au cours du jeu, au fur et à mesure qu’on en trafique le code. Le petit poney se dote de lasers et d’ailes pour un combat épique et inattendu, on se demande en permanence s’il faut jouer le jeu ou tenter de le contourner, le gameplay parvient à se renouveler malgré une base simpliste au possible dans cette aventure pleine de surprises.

Un des menus tout pétés.

Facile et logique dès qu’on a appréhendé chaque nouvel élément, c’est une expérience qui demande tout de même un minimum de skill et de précision. Elle se parcourt le sourire aux lèvres et avec l’impression d’être pris pour un con par le programme, ce qui augmente d’autant la satisfaction lorsqu’on parvient à en résoudre les énigmes. Plutôt correctement traduit en français, ce qui ne gâchera pas le plaisir des anglophobes, c’est une balade bizarre qui jusqu’à la fin reste floue sur ses intentions, avec cette dernière supplique surprenante.

Lancé sans trop savoir où je mettais les sabots suite à un cadeau du bien nommé shadowproject, Pony Island m’a aspiré durant les trois heures qu’il m’a fallu pour le parcourir. Crée à l’occasion d’une GameJam en 2014 et peaufiné ensuite jusqu’à sa sortie en janvier 2016, c’est un jeu dont je recommande fortement d’y perdre du temps. Je doute de sa rejouabilité parce qu’il finirait par être répétitif sans l’élément de découverte qui accompagne le gameplay mais pour 4,99€ sur Steam, Daniel Mullins, l’inspiré créateur de cet ovni, offre un titre décalé et autoparodique bien plus intelligent qu’il n’en a l’air.

C’est Satan qui code, tu m’étonnes qu’il y ait des bugs.

Et puis dedans il y a un poney qui crache des lasers et qui vole. Je ne vois pas ce qu’il vous faut de plus pour vous jeter dessus.

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