Soldats Inconnus : Mémoires de la Grande Guerre – Salut les poilus

Tain les cons. Ils ont réussi à me faire lâcher une larme. Pourtant on parle de Soldats Inconnus, un jeu en dessin animé où on passe son temps à esquiver les ennemis (ou à la limite les assommer avec une louche), où un des personnages les plus important est un chien et où activer des leviers est une part importante du gameplay.

À la base, je ne suis pas fan de l’idéologie dans l’histoire, de la glorification des soldats français et la diabolisation de ses ennemis. Ça tombe plutôt bien puisque Ubisoft Montpellier a fait le choix de la jouer réaliste et non cinématopropagandiste. Non, je ne pense à aucun autre jeu ou film sur la guerre en disant ça, pourquoi ? L’action se passe durant la première guerre mondiale, où les français et leurs alliés combattent les allemands. Leur première bonne idée : les personnages.

On va contrôler plusieurs protagonistes : un fermier français, son gendre allemand envoyé combattre de l’autre côté de l’uniforme, un volontaire américain et une infirmière belge. Sans oublier le chien. Décider dès le départ de ne pas instaurer de bons et de méchants, de présenter des moments de la guerre que ce soit côté civil ou militaire, cela va directement poser des questions que n’évoquent même pas la plupart des jeux qui prennent la guerre comme contexte.

Si le jeu commence en 1914 et se termine en 1917, c’est pour mieux nous faire vivre les moments les plus marquants de la guerre. Le chemin des Dames, les camps de prisonniers, les tranchées, Verdun, la vie des civils en territoire occupé, les gaz de combat… on nous envoie en découvrir des tranches de ce conflit, dans une zone située entre la Somme, les Ardennes et la Belgique.

Toujours accompagné de courtes informations sur la réalité historique des évènements que décrit chaque niveau, le joueur évoluera dans un décor aux dessins de grande qualité, fin et lisible. Les voix sont des borborygmes d’où il est possible de ressortir quelques mots en français, anglais ou allemand, ce qui accompagne bien l’ambiance sonore très réussie avec ses chansons d’époque et les tirs d’artillerie.

L’enrobage est très beau, le contexte est traité intelligemment et le scénario sait même nous surprendre avec des moments intenses. Mais qu’en est-il du jeu en lui-même ? Le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est moins réussi. Chaque niveau est un puzzle qu’il faut résoudre en accomplissant diverses tâches, en assemblant des objets ou en avançant au bon rythme pour passer les obstacles.

Simples au début, ils se compliquent doucement par la suite avec l’ajout de nouveaux mécanismes, mais on retombe vite dans une certaine répétitivité avec ces leviers à activer, ces objets à lancer au bon endroit, ces gardes à esquiver en se planquant dans les fourrés et ces mitrailleuses dont il faut attendre le rechargement pour passer sans risque.

Sans être jamais frustrants, certains passages sont plus complexes que d’autres comme le camp de prisonniers ou les quelques « boss » qui demandent un certain timing. De temps à autres, des mini-jeux viennent varier les plaisirs et des QTE s’imposent à nous pour soigner les blessés. Mais globalement, on fait toujours un peu la même chose.

Cependant chaque niveau est court et ne laisse pas le temps à l’ennui de s’installer. On continue pour savoir si Karl va revoir sa femme et son fils, si Freddie sera enfin reconnu pour son courage malgré sa peau noire ou si Walt le chien survivra aux horreurs de la guerre. On s’attache à leur destin, tragique, victimes de décisions prises loin des lieux de drames, on se réjouit lorsque l’histoire leur redonne des raisons d’espérer, on serre les dents quand l’un d’entre eux est fait prisonnier…

La durée de vie n’est pas exceptionnelle puisqu’il m’a fallu environ sept heures pour arriver à la fin, mais malgré les quelques faiblesses du gameplay, c’est une aventure que j’ai vécue quasiment d’une traite, sans me soucier des objets à récolter. Le scénario suffit largement à donner des raisons d’avancer et offre une satisfaction bien supérieure à un inutile 100% sur chaque niveau.

C’est bien le traitement, autant scénaristique qu’artistique, de cette période dramatique de l’histoire européenne qui est remarquable dans ce jeu, bien plus finalement que les phases de gameplay sans défaut majeur mais sans grand relief. La version française est évidemment de très bonne qualité, pour une fois qu’il s’agit de la version originale, profitons-en.

Il m’a permis d’ailleurs d’en apprendre plus sur les Harlem Hellfighters (et d’acheter ensuite la BD éponyme de Max Brooks et Canaan White (oui, celui de World War Z. Le bouquin, pas le film moisi, restons polis)), de me replonger dans les chiffres effrayants de victimes ou de redécouvrir la réalité des gaz de combat à base de chlore (voir cette vidéo d’e-penser sur le sujet).

Un jeu qu’on suit comme une bande dessinée animée, qui fait réfléchir et qui sans être parfait propose quelque chose d’assez rare dans le domaine du jeu vidéo de guerre. Sorti il y a déjà trois ans, il passe régulièrement à moins de 4€ en promo mais les 15€ demandés plein tarif ne sont pas honteux vu la qualité de l’ensemble. C’est définitivement une expérience à vivre et qui, comme toute guerre, ne peut par définition bien finir.

Attention, nécessite Uplay, même si vous achetez le jeu sur Steam.

Retour au sommaire