Silence of the Sleep – Le sommeil de la peur

Je n’aime pas les jeux d’horreur. Surtout quand c’est à base de scare jump pour film d’ado, le genre qui te file de gros coups de coudes en te disant : hey, c’est le moment d’avoir peur ! Traumatisé par Alone in the Dark en 1994, j’ai longtemps gardé cette habitude de rester loin de ces titres capables de me ruiner mes nuits.

Et puis un jour, passé trente ans quand même, je m’y suis mis doucement. J’ai bien aimé Dead Space (le premier, faut pas déconner non plus), Amnesia, etc… Je jouais en plein jour, de préférence avec le soleil qui se reflète sur l’écran, mais ça passait. Je ne suis pas devenu un addict du genre mais après Syndrome, le concentré de gros clichés du genre, j’avais envie d’une autre expérience angoissante.

Silence of the Sleep, refilé sous le manteau par Baalim, rentre dans la catégorie horreur psychologique. Alors il a effectivement quelques jump scare planqués et des effets sonores parfois un peu excessifs ; mais si l’on ajoute à cela une maniabilité très rigide et par endroits frustrante, je crois qu’on a fait le tour des défauts de ce jeu.

Petite conversation à côté de la porte des chiottes.

L’intro nous montre un homme qui se laisse tomber du haut d’une falaise et qui se réveille dans un motel en ruines. L’endroit est sombre, humide, froid, angoissant. On dirige Jacob dans les couloirs en le faisant progresser vers la droite ou la gauche mais il faut parfois se tourner pour atteindre les portes ou les couloirs. C’est là qu’intervient le côté pénible des contrôles, surtout lorsqu’on est poursuivi.

Parce que le motel n’est pas vide ; après avoir rencontré un barman aussi nébuleux qu’amical, on pourra taper la causette à tout un tas de gens tout aussi dérangés. Une femme en rouge, un orchestre de jazz qui joue en boucle, un psychologue qui nous fournit en petites pilules, un peintre de lapin, tout ça semble déjà assez bizarre mais ce n’est rien à côté des squelettes à tentacules.

Les phases de dialogue – enquête mâtinées de quelques éléments d’horreur alternent avec des phases de cache-cache avec les monstres dans des couloirs miteux où il faut compter sur sa lampe torche pour y voir quelque chose. Mais ces créatures rôdent et il faut les esquiver en fuyant ou en se planquant derrière des caisses #JeSuisSolidSnake. On les repère de différentes façon ; elles font du bruit (heureusement que l’odorama n’existe pas, dirait Chirac) mais notre personnage peut aussi écouter aux portes ou jeter un œil pour nous dire s’il en voit une et si elle s’éloigne ou s’approche.

J’ai bien fait de regarder avant d’aller dans le couloir.

Les premières minutes dans ces dédales bordéliques sont flippantes, les ennemis cauchemardesques sortent de nulle part, on ne sait ni où on va ni ce qu’on cherche et on meurt souvent. Le game over illustré par un délire liquide sordide est un peu particulier mais on s’y fait. À force, on repère les chemins de ronde, les lieux où on peut se planquer en attendant que les bestioles passent, puis on commence à chercher ce qu’on fout là pour débloquer la suite du jeu.

C’est donc un jeu de puzzle dans le noir avec un croque-mitaine qui se trimballe avec une sirène histoire de bien te faire flipper (et de jamais te choper par surprise), entrecoupé de phases de puzzle avec dialogues où Jacob tente de comprendre ce qu’il fait là. Il faut s’accrocher un peu pour rentrer dedans mais l’ensemble est très satisfaisant à jouer. c’est l’inverse d’un jeu calibré pour le grand public, certaines énigmes sont de vraies trouvailles, les personnages sont d’autant plus flippants qu’ils sont des havres de paix au milieu d’un cauchemar visqueux et les dialogues sont bien pensés.

Un moment de calme et de musique, assez rare pour être signalé.

La difficulté réside dans le côté labyrinthique des décors qui illustre bien l’état mental de Jacob. Trouver la solution est plus simple que de survivre jusqu’à pouvoir la mettre en pratique et on guette fébrilement les points de sauvegarde répartis avec parcimonie dans les niveaux. Si cela n’est pas gênant dans les passages plus calmes, il peut être frustrant de réaliser un sans-faute avant de se faire choper par un monstre à cause d’un mauvais enchainement de touches. Devoir recommencer tout un passage parce que Jacob met deux plombes à se retourner aurait pu faire valoir à mon clavier de faire un tour dans le jardin.

Il n’y est finalement pas allé, sinon j’aurais du mal à écrire ça, mais surtout parce que ce jeu est pétri de bonnes intentions. Celle de vous faire peur mais intelligemment. Celle de vous faire réfléchir sans vous prendre par la main. Celle de vous faire observer la folie s’emparer de Jacob, de le voir douter de tout ce qui l’entoure et même de ses souvenirs récents quand nous, joueur, avons beaucoup plus d’infos que lui. C’est le travail d’un seul homme et le tout forme un ensemble cohérent, intriguant et surprenant malgré ses limitations techniques. Disponible à 14,99€ sur Steam mais habitué des bundles et des soldes, je vous le recommande d’autant plus si vous tombez dessus à bas prix.

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